Naïveté: est-elle réellement un défaut ?

On a fâcheusement tendance à attribuer la naïveté aux simples d’esprit, aux niais, aux personnes sans vécu et sans jugeote. Il faut sortir de ce schéma à tout prix.

Vous êtes du genre à croire tout ce qu’on vous dit ? Vous accordez votre confiance aux inconnus ? Vous êtes une éponge à mensonges et désespérez d’un jour ne plus tomber dans des panneaux plus gros que vous ? Cessez de vous reprocher votre naïveté et faites-en votre force.

Être naïf c’est avant tout porter un regard neuf sur le monde. La naïveté fait partie de ces soi-disant défauts qui en fait n’en sont pas, à l’image de la gourmandise ou la curiosité. Elle est en réalité le vecteur des grandes qualités créatives et sociales.

Mais attention tout de même de ne pas tomber dans l’excès !

N’abandonnez pas vos utopies

La naïveté est une notion extrêmement subjective. N’est-on pas tous le naïf de quelqu’un d’autre ?

En politique, on voudrait toujours faire passer l’adversaire pour quelqu’un de naïf. On lui reproche de ne pas avoir compris les réalités du monde, de l’économie, de la société et de croire que son modèle redressera le pays alors que l’on sait bien que seul le programme du candidat que nous supportons pourra nous sortir de la crise.

En fait, un naïf, c’est quelqu’un qui ne voit pas les choses de la même manière que nous, qui n’a pas les mêmes idéaux, qui n’est pas structuré par les mêmes schémas de pensée, celui qui n’est pas confronté de la même manière que nous au fameux « principe de réalité » qui n’a de réalité que le nom.

On a souvent tendance à qualifier les utopies de naïvetés, mais ne sont-elles pas les vrais moteurs du changement ?

Être naïf ne signifie pas être bête

L’excès de naïveté n’est pas un manque d’intelligence. Il est plutôt une absence d’appréhension.

La naïveté n’a rien à voir avec l’intelligence. Être naïf c’est avoir un regard neuf et vierge sur les choses. C’est un état d’esprit plutôt qu’un manque de connaissance ou d’expérience.

La personne naïve vit dans le même environnement que la personne pleine de certitudes. Elle reçoit les mêmes informations. Elle les traite simplement différemment.

En fait, la naïveté n’est pas tellement la bêtise de celui qui ne sait pas, mais plutôt l’aptitude de celui qui veut toujours en savoir plus et qui ne considère rien comme sûr ou acquis.

Être naïf, c’est avant tout être ouvert à de nouveaux points de vue, à de nouvelles opinions.

Les plus grands scientifiques cultivent une part de naïveté, une innocence qui leur permet de croire à des théories qui n’ont pas encore été validées. Cela ne fait pas d’eux des gens stupides.

La naïveté est source de créativité

Si les scientifiques parviennent à garder une certaine naïveté, les artistes et les conteurs aussi. C’est cela qui leur permet de voir le monde autrement.

Le personnage de Candide imaginé par Voltaire en est le parfait exemple. Grand naïf, il raconte le monde sans aucun a priori, décrivant par exemple des scènes de guerre comme de majestueux spectacles sans être capable de juger les évènements et les personnes qu’il rencontre. C’est de cette naïveté extrême que Voltaire se sert pour montrer à ses contemporains le monde dans lequel ils vivent d’une manière différente.

Être naïf c’est garder son âme d’enfant, s’émerveiller d’un rien, ne pas être blasé d’une vie dans laquelle on penserait tout connaître et tout comprendre.

Appréhender une situation, vouloir la comprendre, est un mécanisme de défense. Il permet à l’esprit de se rassurer en évoluant dans un cadre qu’il connaît ou qu’il croit connaître.

Mais en se protégeant ainsi, l’esprit trop lucide s’interdit de nouvelles connaissances, de nouvelles conceptions, de nouvelles rencontres, de nouvelles créations. Une certaine dose de naïveté nous encourage à repenser le monde dans lequel nous vivons. En cela, elle est un moteur de créativité.

La naïveté est un moyen de se protéger

La naïveté peut également être vue comme un mécanisme de défense. En refusant de voir tout ce qui nous dérange, en occultant de notre réalité tout ce qui est pénible, notre inconscient nous protège d’un monde trop dur et trop complexe.

Mais à cette naïveté saine, il faut ajouter un soupçon d’esprit critique. N’être sûr de rien est une chose, mais en être conscient en est une autre.

Une personne naïve accomplie, c’est avant tout quelqu’un qui n’a aucune certitude et non quelqu’un qui croira en n’importe quoi.

L’utopie et le rêve sont des moteurs. L’optimisme de celui qui pense pouvoir imaginer le monde de mille manières différentes le rend heureux. Mais attention à ne pas vous endormir pour autant.

Attention à ne pas devenir crédule

Si l’abus d’estime de soi et d’assurance peut être néfaste, l’excès de naïveté peut également s’avérer gênant. Attention à ce que votre candeur ne se transforme pas en crédulité.

S’il est intéressant de poser un regard neuf sur les choses et les personnes, appréhender une situation avec un minimum de méfiance n’est pas inutile pour autant.

Dans une situation potentiellement dangereuse, l’abus de naïveté peut vous porter préjudice. C’est d’ailleurs sur ce point que se basent les groupes sectaires, qui profitent de la trop grande crédulité de certaines personnes (et souvent de leur détresse) pour les embrigader dans des entreprises de déstabilisation mentale, le plus souvent dans le but de leur extorquer de l’argent.

Les excès ne sont jamais bons et sont souvent les symptômes d’un mal-être. Tout est question d’équilibre.

Essayez de rester ouvert au changement et à l’inattendu sans pour autant prendre des risques inconsidérés.

Il vous faudra pour cela trouver le bon dosage entre naïveté et méfiance pour ne pas vous mettre en danger ni tomber dans la paranoïa ou la rigidité mentale.


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